Sansonnet

(19 mars)

Je viens de terminer L'extravagant Voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet, de Reif Larsen. Je l'avais acheté parce que je n'ai pas pu voir le film, mais que l'histoire me paraissait intéressante. Evidemment, le livre était bien en vue dans les rayons, au moment de la sortie du film. De fait, l'adaptation au cinéma a pas mal modifié le récit, notamment en ce qui concerne l'âge du héros (dans le livre, T.S. a douze ans) et la raison pour laquelle il reçoit son prix. Pour Reif Larsen, T.S. est un jeune homme doué pour le dessin, qui "cartographie" tout ce qui l'entoure. Ici se pose bien sûr un problème de traduction, puisqu'une "mind map" n'est pas vraiment ce qu'on appelle une "carte" en français, mais une fois qu'on a accepté que ce terme pouvait recouvrir aussi des schémas et qu'on s'est habitué à aller et venir entre le texte principal et les notes ou "cartes" situées dans les marges, le roman est passionnant. En tout cas, moi, je l'ai beaucoup apprécié, avec ses côtés parfois un peu délirants (et qui sont précisément la raison pour laquelle l'attention de Jean-Pierre Jeunet s'était portée sur ce livre).
Il y a par exemple, vers la fin du récit, un commentaire marginal dans lequel T.S. nous livre les indices qui lui permettent de reconnaître un vrai adulte.
(Je cite la traduction de Hannah Pascal, parue eu livre de Poche:)
"On est un vrai adulte si:
1. On est toujours fatigué.
2. On n'a pas hâte que ce soit Noël.
3. On a très peur de perdre la mémoire.
4. On travaille dur toute la semaine."
Certes, je suis assez souvent fatiguée, mais j'aime toujours Noël, surtout depuis que j'ai des enfants auxquels faire des cadeaux. Pour ce qui est la mémoire, je ne suis pas encore assez vieille pour redouter de la perdre. pas assez âgée non plus pour le point suivant:
"5. On porte des lunettes de vue autour du cou et on oublie toujours qu'on porte des lunettes de vue autour du cou.
6. On prononce les mots: 'Je me rappelle quand tu étais grand comme ça' et on secoue la tête en faisant une UA-1, UA-24, UA-41, qu'on peut traduire grossièrement par: 'Je suis très triste parce que je suis déjà vieux et que je ne suis toujours pas heureux.' "
Je ne suis pas sûre de dire souvent ce genre de choses à mes enfants, mais peut-être que cela viendra.
"7. On paie des impôts et on aime bien s'énerver avec d'autres adultes en se demandant 'ce qu'ils peuvent bien faire avec tout le fric qu'on leur donne.'
8. On aime boire de l'alcool tous les soirs tout seul devant la télévision.
9. On se méfie des enfants et de ce qu'ils peuvent avoir derrière la tête."
Je me sens peu concernée par le point 7 (même si je paie des impôts, quand même!), et pas du tout par le 8: je ne bois pratiquement jamais d'alcool, et je regarde rarement la télévision le soir. Quant au neuvième indice, il ne me concerne pas du tout. J'aime bien les enfants, et je ne vois aucune raison de me méfier d'eux. Les dernier critère de reconnaissance des adultes me paraît bien triste, et je ne le partage pas du tout:
"10. On ne se réjouit de rien."
Dieu merci, j'ai conservé une certaine capacité à me réjouir. Du texte que je viens de citer, par exemple. Mais, bien que je le trouve assez vrai sur certains points, je me demande, du coup, si je suis vraiment une adulte...

(Et pour celles et ceux qui s'inquiètent pour Bellzouzou: disons qu'un indélicat est tombé sur son blog, et qu'elle a jugé bon, du coup, de l'expurger un peu. Elle reviendra dès qu'elle aura fini son petit ménage...)


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