Nationalité de papier
(18 septembre)
Lorsque j'ai divorcé, je n'ai pas fait refaire immédiatement ma carte d'identité. Il faut dire qu'il y avait à l'époque des délais abominables pour obtenir un rendez-vous. C'est seulement cet été que je me suis enfin lancée dans la démarche.
J'ai rempli le formulaire en ligne, en pestant contre le menu déroulant qu'il a fallu ouvrir une bonne dizaine de fois avant qu'il me propose enfin le département adéquat pour la commune de naissance de mon papa, dont j'ai découvert à cette occasion qu'elle avait deux homonymes (pourtant, quand on demande à la toile mondiale, c'est cette ville de banlieue qui apparaît comme premier résultat). Je ne me souviens pas qu'on m'ait demandé de préciser le département de naissance de ma maman, mais j'ai pris soin, par honnêteté, de préciser "Canada" entre parenthèses après le nom du saint.
J'arrive à mon rendez-vous, quelques semaines plus tard, et là, la Madame, en voyant que j'ai écrit "française" pour la nationalité de mes deux parents, me dit que ma maman est canadienne, puisqu'elle est née au Canada.
Quoi?
Je lui réponds que, lorsque je suis née, ma maman était française (et née là où je l'ai indiqué*).
Elle persiste, elle est devenue française par son mariage, oui, mais elle est canadienne. Et elle laisse entendre que la préfecture pourrait faire des problèmes.
Je me retiens de lui renvoyer l'identité de papier de ma mère à la figure, et que puisque c'est comme ça, je vais me contenter de mes documents canadiens. J'insiste pour laisser "française", et j'évite de lui raconter qu'il y a des Français·es qui naissent à l'étranger tous les jours, elle ferait moins la maline si ma mère était fille de diplomates et que j'avais indiqué comme lieu de naissance celui qui figure sur son certificat de décès (et qui est différent de celui qui est mentionné sur mon acte de naissance*).
Elle consent en faisant la moue, et on verra bien si la préfecture demande des précisions, me dit-elle.
Mon sang bouillonne, je vérifie en rentrant si la nationalité figure sur les actes de naissance dont j'ai une copie à la maison.
Bien sûr que non, et cette bonne femme était dans son tort. J'ai reçu à peine dix jours plus tard une notification m'invitant à aller chercher ma nouvelle carte d'identité. Et j'ai eu le bonheur de tomber sur une remplaçante, au moment de la récupérer (bon, du coup, on n'a pas trop su quoi faire quand il s'est avéré que la carte était "désactivée" et qu'il était impossible de confirmer mon identité numérique).
Depuis, Numérobis s'est lancé dans les démarches pour obtenir son passeport canadien.
Et là, c'est l'administration qui devrait revoir la version francophone de ses formulaires...
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| ("fournir les informations demandées qui se trouve dans le passeport délivrer a son nom") |
![]() |
| ("Veuillez précisez") |
* Ma maman avait été adoptée bébé. A l'époque de l'adoption, les autorités canadiennes notaient comme lieu de naissance celui du baptême, ou de la commune de résidence des adoptants, soit, pour ma mère, un Saint-N. C'est ce lieu de naissance qui figure sur l'acte de mariage de mes parents et sur tous nos actes de naissance. Mais dans les années 1980, une loi est passée au Canada, avec effet rétroactif, obligeant à indiquer le lieu de naissance réel. Ma mère a donc découvert, en voulant faire refaire ses papiers (français, il lui fallait un acte de naissance), qu'elle était née à Montréal. Et c'est le nom de cette métropole qui figure comme lieu de naissance sur son certificat de décès. Ce qui conduit à cette absurdité: la femme dont mon père est veuf n'est pas née au même endroit que celle qu'il a épousée...
Libellés : humeur, service public




9 Commentaires:
J'aime bien votre conclusion. J'espère votre papa trouve ça drôle aussi.
Ma mère est née en Suisse mais je n'ai jamais eut ce genre de problème, mon frère oui, un jour où la dame de la mairie (à une époque sans informatique et sous un certain Pasqua) à mis en doute sa nationalité puisque née d'une suissesse ( qui était aussi devenus Française) ! "Il lui à répondus, je suis instituteur, et pour ça, j'ai du prouver que j'étais Français, j'ai fait mon service ! il faut être français aussi ! il vous faut quoi de plus ? " bon, en plus il était née en France, alors... Ah, quand certains petit fonctionnaires de mairie veulent refaire la loi :-(
Peut-être que ton Papa n'a pas toujours pris ça comme une "absurdité" mais comme un plaisir délicat...
Bleck
Les micros-pouvoirs tu sais Gilsoub.... c'est terrible, un truc de frustré et ils sont légion ça va du mec de la déchetterie à l'expert judiciaire en mécanique en ce qui me concerne et je suis littéralement ahuri par leur comportement de dictateur.
Bleck
Bleck, Madame Chapeau, je n'ai jamais évoqué cette bizarrerie avec mon Papa.
Gilsoub, Bleck, je me demande quelle frustration il y a derrière ces abus de pouvoir, et je plains les personnes dont le cas est plus complexe que le mien (ma mère avait bien du mal à prouver qu'elle était française, quand son lieu de naissance avait changé; quelles peuvent être les difficultés de quelqu'un qui est né dans un pays où l'état civil est inexistant?)
Bismarck, la frustration d'une vie de merde par exemple l'aigri le complexé, dans ma vie j'ai pu souvent remarquer que le comportement désagréable était fréquemment celui du bas de l'échelle, le cheffaillon, l'adjoint de l'adjoint de l'adjoint etc...
Bleck
Il y a une petite différence entre la France et le Canada (et la Suisse), c'est que quelqu'un bébé né au Canada est automatiquement Canadien, alors qu'un bébé né en France (ou en Suisse) n'est pas automatiquement Français (ou Suisse). Ca peut peut-être expliquer ce genre de confusion. Mais bon, y'a plein de gens nés au Canada qui ont aussi d'autres nationalités. J'ai un jour été la victime d'une personne comme ça, qui a refait la loi à sa façon, et ça m'a foutu en l'air six mois de ma vie! (Ouïe les fautes!!)
Dr CaSo, ça m'étonnerait que cette dame soit au courant de ce genre de subtilités. J'ai deux neveux et une nièce né.es au Canada et qui doivent avoir trois nationalités: canadienne, française et chypriote.
Bleck, est-ce que tout ce monde voudrait se faire calife à la place du calife?
J’ai connu le même genre de tracasseries administratives lors de l’installation de la pension de réversion pour ma mère, née à Strasbourg en 1940 -donc sous législation allemande à cette date-, et dont le prénom d’usage, légalement francisé à la libération, était différent du prénom attribuée à la naissance par l’officier d’état civil allemand. Faire comprendre cela à un fonctionnaire « de l’intérieur » ne fut pas de tout repos…
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